On trouvera ici, sur une famille d'artistes distingués, assez
mal connue ou tout à fait négligée des biographes,
quelques renseignements que j'ai pu puiser aux meilleures sources.
Le premier membre de cette famille qui vint en France fut Filipe CAFFIERI.
On a su que le cardinal MAZARIN le demanda au pape, qui l'employait
à Rome où Filipe était né, descendant d'une
maison napolitaine, que de bonnes alliances dans le royaume de Naples
avaient établies honorablement parmi les patriciens ; je n'ai
rien trouvé qui justifiât ou contredit ces assertions.
Quoqu'il en soit, Philippe 1er CAFFIERI vint à Paris, sous le
ministère de MAZARIN, comme tant d'Italiens qui comptaient sur
l'appui de leur heureux compatriote pour faire fortune.
Que le cardinal l'ait produit tout d'abord en le donnant à COLBERT,
qui le fit connaître à Charles LE BRUN, je le
crois. Quant à l'époque où cela put avoir lieu,
je pense que ce fut vers l'année 1660, peu de temps avant la
mort de MAZARIN.
Ce qu'il y a de positif c'est que CAFIERRI était aux Gobelins
avant 1665. Alors il s'était acquis déjà l'estime
et l'amitié de LE BRUN, à ce point que celui-ci voulant
établir une de ses jeunes parentes, la donna à Philippe
CAFFIERI. Le mariage eu lieu le 20 juillet 1665, à la paroisse
de Saint-Hippolyte. L'acte d'union de CAFFIERI avec Françoise
RENAULT de BEAUVALLON fut signé par LE BRUN, Domenico CUCCI,
l'ébéniste du Roi, et Jean JANS, le chef des tapissiers
de la manufacture. J'avais espéré que l'acte du 20 juillet
1865 me ferait connaître l'âge, la naissance et le père
de CAFFIERI ; mais point : " furent mariés Philippe CAFIER
(sic) et Françoise RENAULT, tous deux de cette paroisse",
c'est tout. Le nom de BEAUVALLON que portait Françoise RENAULT
est supprimé comme dans tous les actes, deux exceptés,
où se trouve nommée la femme de Philippe 1er CAFFIERI.
Les époux, par un singulier oubli, ne signèrent point,
et la première signature que je trouve du sculpteur qui nous
occupe est au bas de l'acte de mariage du sculpteur Jean LEGERET avec
Elisabeth YVART, le 10 mai 1666. Ce jour là il signa Philippe
CAFFIER.
Cinq jours avant cette noce, Françoise RENAULT, qui commençait
cette heureuse fécondité dont nous allons voir les fruits
nombreux, avait mis au monde Suzanne (5 mai 1666), tenue par "
Paul Gédéon du METZ intendant des meubles de la couronne
", et par " Suzanne BUTAY, femme de Charles LE BRUN ".
Le 26 juin 1667, mademoiselle CAFFIERI accoucha d'un fils, François
Charles, tenu par Chales LE BRUN. Le 10 septembre 1669, Marie Jeanne
fut baptisée présentée par " Jean JANS, maistre
tapissier ordinaire du Roy ", et par Jeanne GOUGEON, femme d'honorable
personne Dominique CHUSSY (sic pour CUCCI), "ébéniste
ordinaire de sa majesté." Le 10 février 1671 naquit
Philippe, nommé par Domenico CUCCI. Le 20 juin 1672, baptême
de François. Le 27 août 1674, Virginie Marie, sixième
enfant de P. CAFFIERI, fut présentée à l'église
par la femme de Renè HOUASSE, le peintre, et par Paul GOUGEON,
Peintre du roi. Le 16 mai 1676, François Antoine eut pour parrain
François VERDIER peintre du roi. Dans l'acte de son baptême
son père est dit " P. CAFFIERI, contrôleur des bâtiments
du roi ". Le 18 août 1677, on baptisa Guillaume, tenu par
Guillaume ANGUIER, peintre du roi. Le 25 août 1678, Jacques, fut
tenu par ROCHON, concierge de l'hôtel de Gobelins, où demeurait
P. CAFFIERI, et par la seconde femme de Dominique CUCCI, Catherine ANGUIER.
Enfin, le 8 mars 1681, naquit le dixième enfant de Françoise
RENAULT, Jean Baptiste, dont fut marraine Suzanne BUTAY, femme du sculpteur
J.B. TUBY. On voit que les assertions de la Biographie Universelle,
qui donne a Philippe CAFFIERI trois filles et quatre fils, ne sont guère
d'accord avec les actes portés aux registres de Saint6Hippolyte.
Les actes qui ne sont pas personnels à Philipe CAFFIERI, et qu'on
lit dans les registres dont je parle, sont en outre, celui de 1666,
que l'ai mentionné plus haut, trois actes de baptême où
il figure comme parrain (16 novembre 1670; 16 août 1675; 19 septembre
1682), et deux actes de mariage où il paraît comme témoin
(5 février 1673; mariage de René Antoine HOUASSE; 20 février
1678, mariage de Dominique CUCCI et de Catherine ANGUIER). Ajoutons
que sur les registres de Saint-Louis en l'Ile, on voit " CAFFIERI
témoin du mariage de Jean POULTIER, sculpteur (6 février
1678).
Philippe CAFFIERI travailla pour les châteaux royaux, et comme
tous les artistes qui contribuèrent à l'embellissement
de ces magnifiques résidences, il eut un compte ouvert dans les
registres des bâtiments du Roi, tenus par les Intendants généraux
cchargés de ce service. Ces registres sont aux Archives de l'Empire,
où j'ai pu les consulter. J'y ai vu qu'il fit beaucoup de sculptures
au bois dans le grand appartement du Roi à Versailles, dans le
petit cabinet de Louis XIV, dans la salle des gardes de la Reine. Il
composa et exécuta en bronze des chapiteaux pour le cabinet des
bains, des roses de métal pour la grande galerie de Chambord,
etc, etc ... . Ce fut lui qui décoré de sculptures sur
bois une barque construite sur le grnad canal de Versailles, en 1863
et 1864 par ordre du roi. Un détail des ccomptes des "Bâtiments",
à la date du 10 novembre 1686, me fait connaître qu'entre
autres ouvrages de bois, Philippe CAFFIERI fit des bordures paour les
tableaux du cabinet de Louis XIV. Ce travail, exécuté
en 1682 et 1683 lui fut payé 4869 Livres en 1866. Ses travaux
furent assez considérables pendant l'année 1681, pour
qu'il reçut la somme de 25.553 Livres, sur les fonds des différents
châteaux. Si je relevais toutes les sommes qu'il reçut
pendant son long exercice dans les Bâtiments, je montrerais qu'il
fut un des plus employés entre tous les sculpteurs au service
de Louis XIV. Outre les parties qui lui sont attribuées dans
les détails des registres, CAFFIERI figure sur l'état
des Gages annuels attribués aux personnes retenues par S.M. pour
les bâtiments J'y vois qu'il recevait par an, de pension fixe,
150 livres, qu'on donnait aussi à Louis LE GROS, à Philippe
BUYSTER, à Mathieu LESPAGNANDEL, à Pierre MAZELINE et
à Thomas REGUANDIA.
On lit, dans un Etat du Trésor Royal pour l'année 1665
(Bibl. Imp. Ms Colbert 7; fol. 18 V°) : "A CAFFIER, sculpteur,
106 l pour une bordure de huit pieds de long sur six de large, de 72
l et un pied d'estail porté à Versailles, de 34. Plus
: 741 l pour 10 bordures de tableaux de plusieurs grandeurs de sculptures,
pour servir au cabinet du roi". Un des registres de Bâtiments
du Roi, porte à la date du 28 mai 1679, cette mention : "
A CAFFIERE (sic), sur les bordures des tableaux du cabinet du Roy, 400
l. A luy sur les ouvrages des petits appartements du Roy, 100 l. A luy
sur la sculpture de la corniche de la chapelle de Versailles, 400l."
Phiilippe 1er CAFFIERI ne fut point admis à l'Académie
Royale de peinture et de sculpture* soit que le temps lui manquât
pour faire un morceau de réception, soit plutôt que le
genre dans lequel il s'exerçait, et où il excellait d'ailleurs,
ne fut pas assez relevé pour justifier la présence de
l'artiste dans une compagnie où la grande sculpture donnait seule
entrée.
Philippe CAFFIERl, qui avait quitté l'hôtel des Gobelins,
vers 1688, pour une cause que j'ignore, demeurait, en avril 1696, rue
Saint-Victor, au coin des Fossés St-Victor, paroisse Saint-Nicolas
du Chardonnet ; c'est ce que m'apprend un pouvoir donné par lui,
vingt ans après dans la maison - sa propriété peut-être
- de la rue Saint-Victor, ce qu'ont ignoré les biographies qui
ont su seulement qu'il décéda en 1735. Ce fut en septembre,
ce qu'on n'a pas su non plus. " Le septième jour de septembre
1716 mourut, et le neuvième dudit mois et an fut enterré
en cette église Monsieur Philippe CAFFIERI, sculpteur du Roy,
et mouleur de bois, bourgeois de Paris, âgé d'environ quatre
vingt deux ans, de cette paroisse, furent témoins , Monsieur
Jacque (sic) CAFFIERI, bourgeois de Paris, fils du défunt. "
St-Nicolas du Chardonnet.
La qualité de * mouleur de bois * donnée à Philippe
CAFFIERI, veut être expli-quée * Beaucoup de gens la prenaient
alors. Une ordonnance de Charles VI avait établi "quarante
jurés compteurs et moleurs de busches " , dont la fonction
consistait à faire mesurer le bois à brûler, vendu
sur les ports de la Seine. La mesure était un cercle de fer,
appelé mole, et dont l'étalon était déposé
par ordre de la prévô-té, au Parloir aux Bourgeois.
Comme tous les offices, la charge de maître mouleur de bois se
pourvoyaient, parce que le revenu en était assez considérable.
Rarement ils l'exerçaient eux-mêmes ; ils déléguaient
ordinairement quelqu'un pour la remplir, corme font aujourd'hui les
titulaires des bureaux de tabac.
Les auteurs de l'article CAFFIERI dans la Biographie-Michaud disent
que " le ministre COLBERT de SEIGNELAY fit nommer Philippe CAFFIERI,
sculpteur, ingénieur et dessinateur des vaisseaux du Roy, et
inspecteur de la marine à Dunkerque ". Il y a là
quelques erreurs à réformer et une lacune à remplir.
Pour ceux qui connaissent l'organisation de la marine sous les Colbert,
il est clair que le sculpteur CAFFIERI ne put être chargé
d'aucune inspection à Dunkerque ou ailleurs. L'inspection appartenait
à l'administration, et CAFFIERI n'était pas commissaire
de marine. Que le Roi ait fait charger Philippe d'aller dans un des
ports militaires dessiner les ornements adaptés aux coques des
navires de l'Etat, et de former une collection de dessins que le ministre
desirait avoir ; qu'on ait ensuite chargé CAFFIERI de la direction
de l'atelier de sculpture dans ce port ou dans un autre, c'est ce qui
eut lieu. Pami les volumes que le port du Havre garda longtemps dans
ses Archives, et qui sont maintenant dans celles du ministère
à Paris, est un volume in-folio, sans titre, relié en
basane, et portant sur le dos un semis de fleurs de lis d'or. Ce volume
est un "Registre concernant l'ordre à tenir, par le maître
sculpteur -dessinateur chargé de tous les dessins de sculpture
des vaisseaux de Sa Majesté au port du Havre de Grâce "•
A la suite d'une " Instruction pour le maître sculpteur dessinateur,
chargé de dessiner tous les dessins de sculpture des vaisseaux
que S.M. fait construire au port du Havre de Grâce ", est
UN frontispice représentant un palmier surmonté d'un soleil
et du chiffre du Roi. Au milieu des branches est un portrait de Louis
XIV (médaille, profil à gauche), à droite et à
gauche duquel figurent les écus de France et de Navarre ; sur
le tronc est attaché un écu aux armes de Montmor. Un canon,
sur affût marin, faisant feu, est au pied du palmier. Ce dessin,
qui ne s'élève guère au-dessus du médiocre
est signé ainsi : " Par P. CAFFIERY, fecit ". Parmi
les dessins que contient le volume, ou en voit quinze de la main de
Philippe CAFFIERI ; plusieurs desquels sont accompagnés de légendes,
remarquables par la signature et l'orthographe italo-française
de l'artiste Romain. Les plus anciens de ces dessins portent la date
de 1685 ; le plus récent, celui du vaisseau Le BRILLANT, fut
exécuté en 1690 ; plusieurs sont faits d'après
les compositions de Jean BERRAIN, dessinateur du cabinet du Roi.
Les Revues, recueillies par LAFFILARD (Vol. Havre I670-1749, et vol.
Dunkerque 1670-1749 ; arch. de la mar) font connaître qu'un CAFFIERI
eut, le 1er novembre 1687, une commission de maître sculpteur
au Havre, aux appointements de 1000 l, par an ; qu'il resta au Havre
dans son emploi, de 1687 à 1691 ; et qu'alors il passa à
Dunkerque, où il resta maître sculpteur, jusqu'au 14 avril
I7l4. LAFFILARD dit quelque part : " Charles
CAFFIERI venu de Dunkerque, le 14 avril 1714, 1000 l ; passé
à BREST le 26 Janvier 1717 ". Ce Charles, ou mieux,
ce François-Charles CAFFIERI était le fils aîné
de Philippe, à qui il succéda à Dunkerque. Sur
Fr. Ch. CAFFIERI, voici une note inscri-te, fol. 59 t, 1er reg. Fonds,
1717 (arch de la Mar.) : " Les officiers généraux
et intendants de Dunkerque en ont fait de bonnes relations ; il est
fils d'un Italien de ce mestier qu'on avait fait venir en France pour
les ouvrages de la maison du Roy ",
François-Charles CAFFIERI mourut à BRESTf le 27 avril
1729, il y était maître sculpteur. Il laissa un fils, Charles:
Philippe, qui avait été envoyé au Havre, le 26
janvier 1717, pour remplacer son père passé à BREST.
Ce fils avait alors vingt-deux ans. Au mois de mai 1729, il passa du
Havre à BREST, où il remplaça, comme maître
sculpteurs François Charles CAFFIERI. Charles-Philippe épousa
- je crois que ce fut à BREST, Marie METIER. Il eut d'elle, le
22 juin 1736, un fils nommé Charles Marie (Reg de Saint-Louis
à BREST).
Charles Philippe CAFFIERI décéda le 14 mai 1766. Charles
Marie avait été élevé par lui dans la pratique
des arts du dessin; il fut d'abord, sous son père, élève
sculpteur au port de BREST. En 1760, il partit pour Paris, afin de travailler
à l'Académie, avec la permission du ministre ; il y resta
jusqu'en 1764,, époque à laquelle il retourna à
BREST, plus capable de seconder Charles Philippe. Le 19 août 1772,
Charles Marie CAFFIERI, qui n'avait eu jusqu'alors que 1000 livres d'appointements,
fut porté sur l'état pour 1400 livres. Il obtint en même
temps une gratification de 1200 l ayant représenté au
ministre que " depuis six ans il était chargé de
ses huit frères et sœurs, et qu'il n'avait pu soutenir cette
famille sans contracter des dettes, pour la somme de 4200 l ".
En 1774, il se retira pour cause de santé. Il eut un brevet d'ingé-nieur
géographe de M. de \/ERGENNE. Comment de sculpteur devint-il
ingénieur géographe, je n'en sais rien. En mars 1779,
il demeurait à Versailles, où il mourut probablement.
Jacques CAFFIERI, le sixième des enfants de
Philippe, né on l'a vu en 1678, devint orfèvre, maître
fondeur et ciseleur. Il épousa Marie Anne ROUSSEAU, dont il eut
sept enfants, du 19 février 1714 à 1726. Le premier Philippe
fut tenu par son grand-père.
Ce Philippe II CAFFIERI fut sculpteur et ciseleur.
Il se maria deux fois, d'abord 7 février 1747, avec Suzanne Edmée
de LIEGE, ayant pour témoin Sébastien LE CLERC et Noêl
HALLE. Suzanne mourut le 12 avril 1749, et Philippe épousa, le
30 août 1751, Antoinette Rose Lambert ROLAND (Reg. de St-Sulpice).
Philippe II mourut le 8 octobre 1774, et fut inhumé le 9, à
St-Sulpice, par les soins "de son frère Jean Jacques CAFFIERI,
sculpteur et professeur en l'Académie de peinture, et de Charles
CAFFIERI, sculpteur du Roi pour la marine, cousin issu de germain dudit
défunt."
Jean Jacques CAFFIERI que nous voyons figurer dans cet acte mortuaire,
est la plus illustre personne de la nombreuse famille dont j'ai fait
connaître quelques membres. C'est à lui qu'on doit ces
charmants bustes - il y en a quelques-uns d'excellents - dont au foyer
public de la Comédie Française on admire le naturel exquis,
le modelé fin et large, le caractère élégant
et la grasse exécution. J'ai dit qu'il naquit le 29 avril 1735.
la Biographie-Michaud le fait naître en 1723. Il vit le jour rue
des Canettes, où demeura longtemps son père. II termina,
par un crachement subit de sang sa carrière heureuse et honorée,
à l'âge de soixante sept ans, dans la maison où
il était né le 22 juin 1792, son corps fut présenté
à Saint-Sulpice, et transporté de là, accompagné
du cierge de la paroisse, jusqu'à I'église de St-Nicolas
du Chardonnet, où est sa sépulture. Jean Jacques CAFFIERI
ne fut point marié. Entre les choses qu'il légua par son
testament était le buste en marbre du poète de BELLOY,
qu'il avait exécuté en I788. Le 22 décembre do
cette année» il avait proposé aux comédiens
du Roi de leur donner cet ouvrage en échange d'une entrée
à vie pour le f: de BUFFON. Cette proposition ne fut point acceptée
; le buste resta dans l'atelier, et fut donné par volonté
dernière à madame VIANY, qui le 23 juillet 1792, écrivit
aux sociétaires du Théâtre français : "
ayant eu le malheur de perdre, par une mala-die précipitée,
M. CAFFlERI mon oncle, il y a eu jeudi dernier un mois, en mourant son
désir a été de me faire jouir des grandes entrées
au spectacle de la Nation ; à cet effet, par testament il m'a
légué le buste en marbre de de BELLOY, etc.." CAFFIERI,
femme VIANY ". Les comédiens acceptèrent l'offre
de la nièce d'un artiste qui avait été l'ami de
plusieurs d'entre eux; ils placèrent 10 portrait de BUIRETTE
de BELLOY dans leur galerie, et donnèrent des entrées
à vie à madame VlANY. Ces entrées, quand elles
les vendait, la Comédie les faisait payer trois milles livres
; c'était le prix que les amateurs donnaient à CAFFIERI
pour chacun de ses bustes en marbre. Lorsque après bien des succès
déjà – CAFFIERI était académicien
depuis 1758 ~ CAFFIERI eut le désir d'obtenir ses entrées
à la Comédie Française, rendez-vous de tout le
beau monde et de ce qu'il y avait d'éminent et de distingué
dans la littérature et les arts, il fit proposer aux sociétaires
le buste de PIRON. M. de BELLOY se chargea de la négociation,
qui réussit, mais peu de jours après, le 28 août
1773, CAFFIERI écrivit aux comédiens pour leur dire qu'il
ne pouvait avoir fini le marbre de PIRON que dans trois ans ; et il
ajoutait " Vous fixez à mille écus vos abonnements
à vie, et c'est exactement le prix de mes bustes ; celui de M.
HELVETISS, qui est actuellement au salon, m'a été payé
sur ce pied …" La Comédie délibéra le
30 août 1773 sur la proposition du statuaire, et un acte engageant
la Comédie et CAFFIERI fut passé ensuite pour affirmer
l'acceptation de l'offre faite par celui-ci (arch. de la Comédie
Française). CAFFIERI avait fait pour les comédiens le
buste de Pierre CORNEILLE qu'on voit encore dans le foyer de la salle;
M. d'ANGIVILLIERS ayant chargé le sculpteur d'exécuter
pour le Roi une statue du grand poète, CAFFIERI écrivit
le 2 novembre 1778 aux comédiens " Comme o» a trouvé
que j'ai réussi pour la ressemblance dans le buste que j'ai fait
pour vous, Messieurs, je vous prie de me prêter pour quelque temps
ce buste." Outre ce morceau, il emprun-ta des portraits peints
de Pierre et de Thomas CORNEILLE que possédait la Comédie.
Au lieu de leur rendre ces deux méchantes peintures, il envoya
aux comédiens du Roi un portrait de Pierre CORNEILLE, fait d'après
Charles LE BRUN, et bientôt après, en leur faisant parvenir
un portrait de Tbomas CORNEILLE, il leur écrivit : " J'ay
profité de la bonne volonté de madame la comtesse de BOUVILLE
( petite-fille de Thomas), qui m'avait confié le portrait original
de Thomas CORNEILLE, peint par Jean JOUVENET, pour en faire faire une
copie; je vous prie, Messieurs, et Mesdames, de vouloir bien l'accepter
comme preuve de mon attachement et de l'intérêt que je
prends à votre collection des grands poètes " CAFFIERI
ajoutait en manière de post-scriptum : " J'ay l'honneur
de vous proposer d'exécuter en marbre le portrait de Jean de
ROTROU pour faire pendant à Pierre CORNEILLE - 9 août 1779.
" Les peintu-res furent acceptées et placées dans
le foy«r intérieur du théâtre. Quant au ROÏRDU
la Comédie le reçut à condition d'une entrée
pour un ami de CAFFIERI. Ce buste est le chef-d'œuvre de son auteur
et un des plus beaux morceaux de la sculpture de l'époque, qui
a rarement ce caractère et cette noble énergie.
Le 16 Juin 1782, CAFFIERI proposa aux sociétaires de la Comédie-Française
de faire les portraits en marbre de Thomas CORNEILLE et de LA CHAUSSEE,
pour les entré d'un ami et de son épouse. Le dernier fut
fait " d'après le portrait de La CHAUSSEE peint par LA TOUR,
et celui de Th. CORNEILLE d'après l'original que possédait
Mme la comtesse de BOUVILLE ". On sait que les deux bustes proposés
font partie de ceux qui ornent le foyer public du Théâtre-Français.
Celui de La CHAUSSEE élégant, fin, gracieusement modelé
et pétri dans le marbre, est l'un des plus attrayants de cette
belle collection.
Le 12 décembre I782, CAFFIERI proposa de faire la portrait en
marbre de J-B RCUSSSAU et de LE SAGE. Il réitéra sa demande
le 12 mai 1783. On lui accorda de faire LE SAGE seulement. En 1779,
il donna les bustes en terre cuite de Philippe QUINAULT et de Jean De
LA FONTAINE. (Une note du 3 janvier 1783 nous apprend que chacun des
bustes en terre cuite de CAFFIERI lui était payé 25 livres).
Le 22 décembre I783 CAFFIERI écrivait : " Toujours
éxact à remplir mes engagements, je me suis empressé
de finir le buste de Jean de ROTROU que j*ai l'honneur de vous envoyer
pour les entrées de M…". Si en 1782 on n'avait pas
consenti à recevoir le buste de Jean-B. ROUSSEAU, plus tard on
l'avait accepté, ainsi que le prouve cette phrase d'une lettre
adressée par CAFFIERI aux Comédiens Français :
" le 15 octobre 1787. J'ay fait placé (sic) aujourd'hui
dans votre grand foyer le buste en marbre de Jean Baptiste ROUSSEAU
; je l'ai fait d'après le tableau original peint en Ï738,
par M, AVED, peintre du Roy, et son ami (l'ami de ROUSSEAUÏ bien
entendu) ". Sur les bases des bustes en marbre que garde le foyer
public de la Comédie-Française, on lit que JJ. CAFFIERI
fit celui de BELLOY 1771, celui de FIRON en 1775,, celui de Pierre CORNEILLE
en 1777, celui de ROTRDU en 1783, celui de LA CHAUSSE en 1785, celui
de Thomas CORNEILLE la même année, enfin celui de J-B ROUSSEAU
en I787.
Jean Jacques CAFFIERI signait ordinairement CAFFIERI, sans prénoms
; du moins tou-tes les lettres qu'a bien voulu me communiquer l'obligeant
archiviste de la Comédie-Française sont signées
ainsi. Ch a vu qu'il signa JJ. CAFFIERI l'acte de décès
de sa belle-soeur en 1749 ; ses ouvrages portant en général
cette signature.
La suite et en cours de frappe....
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